La création : toute une aventure

Pour poursuivre le précédent billet, je vais maintenant détailler la phase de création de Simple IT. Cela commence en été 2006, environ 6 mois après la sortie et le succès de la nouvelle version du Site du Zéro. Elle se termine quelques mois plus tard, en janvier 2007, par la déclaration officielle de la société Simple IT.

La période de réflexion

A partir de l'été 2006, Mathieu et moi étions dans cette phase de doute, ne sachant pas encore comment le Site du Zéro allait évoluer. Nous nous sommes rapidement convaincus qu'une structure légale était nécessaire pour poursuivre l'aventure. En effet, avant Simple IT, toutes les sommes d'argent générées par les publicités et absorbées par l'hébergement et les serveurs dédiés transitaient sur le compte courant personnel de Mathieu. Ce n'était pas simple à gérer ni très logique vu l'ampleur que venait de prendre le site. A ce stade on a normalement une structure spéciale pour une telle activité.Cette phase de réflexion a duré quasiment 6 mois afin d'aboutir réellement en janvier 2007 sur la création de la société. En règle générale, cette phase peut même durer beaucoup plus longtemps. Dans notre cas, l'activité étant déjà lancée, l'analyse et la réflexion ont été largement raccourcies.

Le choix final : la SARL

Nous avions plusieurs choix de structure qui s'offraient à nous :

  1. Une association : c'est très peu cher et facile à créer. Cependant, nous savions dès le départ que nous voulions à terme nous rémunérer de cette activité. Faute de quoi, nous serions obligés de travailler après la fin de nos études, ce qui signerait certainement la fin de l'aventure. Les gérants d'association ne peuvent se rémunérer que dans des cas très spécifiques et réglementés. Autrement dit, nous avons écarté cette possibilité.
  2. Continuer comme avant : le problème se posait au niveau de la loi et du fisc. Nous souhaitions également poser officiellement notre part de ce travail et nous lier mutuellement afin que chacun ne parte pas du jour au lendemain. En effet, l'un sans l'autre ne pouvait maintenir le Site du Zéro à lui tout seul.
  3. Devenir indépendant : il s'agit du régime des micro-entreprises. Malheureusement, cela est réservé à des entreprises individuelles. Nous étions plutôt partis sur une répartition équitable de la structure et de ses responsabilités.
  4. Créer une société : c'est la solution choisie car elle possède tous les avantages requis. En contrepartie, elle coûte plutôt cher (en impôts et en taxes).

Enfin, il existe plusieurs formes de sociétés. Je ne citerai que les principales malgré le fait qu'il en existe un grand nombre :

  1. L'EURL (Entreprise Unipersonnelle à Responsabilité Limitée) : il s'agit d'une entreprise à une seule personne, ce qui ne convient pas dans notre cas. C'est en gros l'équivalent d'une SARL qui ne peut être gérée que par une personne.
  2. La SAS (Société par Actions Simplifiées) : c'est un statut réservé aux entreprises déjà plus importantes. Elle est souple et puissante mais nécessite une administration trop contraignante.
  3. La SARL (Société A Responsabilité Limitée) : c'est la forme de société commerciale la plus commune en France. Elle est simple, pratique et c'est (relativement) une des moins coûteuses.

Nous avons finalement choisi la SARL en nous associant, Mathieu et moi, à hauteur de 50% du capital chacun. L'égalité est parfaite mais peut être bloquante en cas de mésentente sur une décision. Par exemple, si Mathieu veut acheter un nouveau serveur mais que je ne le souhaite pas, nous ne pouvons pas décider car chacun a le même poids (50 %) dans la société. Bien sûr, pour un serveur, ce n'est pas grave mais cela peut le devenir sur une décision majeure.

La rédaction des statuts

Nous nous sommes penchés sur les statuts, c'est-à-dire le document présentant la société, son activité, ses propriétaires (on parle d'actionnaires) ainsi que son règlement intérieur. Nous avons fait rédiger ce document par un avocat spécialisé en droit des sociétés afin d'être sûr de la validité des statuts, véritable socle pour l'entreprise. Fort heureusement, via des connaissances, nous avons pu obtenir cette rédaction à un prix très modeste, soit 300 € (comptez 1 000 € normalement).Nous en avons profité pour inclure une clause pour éviter les blocages. En cas de décision impliquant une somme importante, nous devons être tous les 2 d'accord. En contrepartie, pour les sommes plus modestes, chacun peut décider librement sans attendre l'aval de l'autre. C'est donc beaucoup plus rapide, ce qui est important au quotidien. Après quelques relectures, le document était prêt en quelques semaines.

La réflexion sur les droits d'auteur

Comment gérer le transfert des droits de Mathieu et moi vers la société ? En effet, nous voulions intégrer le Site du Zéro comme produit de la société. Celle-ci a donc besoin des droits d'exploitation de ce site. Cela recouvre les droits des cours rédigés par Mathieu et aussi du logiciel qui gère le site que j'ai en grande partie développé.N'étant pas spécialistes du droit français, nous avons demandé l'aide d'un avocat qui a rédigé un contrat de cession des droits d'exploitation des cours et du logiciel. Ainsi, la société a acquis l'intégralité de ces droits, nous laissant complètement démunis. :( Fort heureusement, la société nous appartient également, cela revient donc au même pour nous ! Cette manoeuvre un peu surprenante (se vendre à soi-même ce qu'on a réalisé) pourrait faire penser à une "magouille" mais il n'en est rien. Nous avons fait valider cette opération auprès de notre expert-comptable et il s'est avéré que c'était une opération assez courante et en aucun cas gênante. Cela tombait bien, ça nous arrangeait pour légaliser les droits.

Le nom de la société

Logo Simple IT SARL Le nom du Site du Zéro a été choisi en 30 secondes à l'époque mais cela n'a pas été le cas pour Simple IT ! Nous nous sommes réunis virtuellement autour d'un tableau blanc en essayant de formuler le plus de noms possibles. A la fin, nous avons choisi celui qui nous plaisait le plus, qui sonnait correctement à l'oreille, qui avait un sens et enfin qui n'était pas déjà déposé en France.Simple IT a une double signification :

  • Simple Information Technology, soit "Technologie de l'information facile" (ça sonne mieux en anglais non ?)
  • Simple it, ce qui, en anglais assez approximatif, correspond à "Simplifie ça"

Finalement, ce nom, ainsi que Site du Zéro et Zozor, le nom de la mascotte du Site du Zéro, sont tous trois des marques françaises déposées, ainsi que leurs logos respectifs. Nous nous sommes rendus à l'INPI (Institut National de la Propriété Industrielle) pour réaliser ces formalités après avoir payé 700 euros bien entendu.

Le lieu d'implantation

Mes parents habitent du côté d'Avignon et j'étudie à Lyon. Les parents de Mathieu sont dans le Gard mais il étudie à Villejuif, en région parisienne. Le choix du lieu d'implantation de la société était vaste.Nous avons hésité grossièrement entre Paris et Lyon. Notre choix s'est porté sur Paris, plus central et plus porteur. De plus, en tant qu'ingénieur, il n'est pas rare de venir travailler sur Paris.L'école d'ingénieur de Mathieu, l'EFREI, aide les créateurs d'entreprise en leur proposant une boîte aux lettres à l'école ce qui permet de se déclarer à l'adresse de l'école et d'avoir accès au courrier très facilement. Nous avons opté pour cette solution, qui a duré jusqu'à la création de nos bureaux actuels à Bourg-la-Reine. La société a donc été créée à l'adresse de l'EFREI, à Villejuif, dans la banlieue sud de Paris.

Les aides financières, les conseils

Ayant tous les deux moins de 26 ans, nous étions éligibles à l'ACCRE (Aide pour les Chômeurs, Créateurs, Repreneurs d’Entreprises), une exonération quasi-totale des charges sociales la première année. Cela représente mine de rien la coquette somme d'environ 4500 € par personne ! Coup de chance, nous apprenons que depuis le 1er janvier 2007, le dossier de l'ACCRE est très largement simplifié !Enfin, nous avons eu accès, via la même aide, aux chèquiers-conseil. Ils permettent de payer des personnes spécialisées pour se faire conseiller avant ou après la création d'entreprise : avocats, juristes, expert-comptables, etc. L'état paie environ 45 € par chèque de 60 €, soit les 3/4. L'entreprise a accès à 3 chéquiers de 6 chèques de 60 €, au maximum.Par la suite, nous avons parlé de cette aventure à un maximum de gens ce qui nous permet d'avoir des conseils à droite et à gauche, via des relations. C'est toujours bon à prendre lorsque l'on n'y connaît rien.Pour finir, Internet est toujours une ressource infinie, avec l'excellent site de l'APCE (Agence Pour la Création d'Entreprises).

Se jeter à l'eau

Lorsque les documents principaux étaient prêts, les recherches abouties, le planning établi, nous avons pu décider d'une date pour se réunir et créer effectivement Simple IT courant janvier 2007. Bien sûr, il fallait se rendre physiquement à la CCI (Chambre de Commerce et d'Industrie) dont Villejuif dépend, en l'occurrence la CCI de Créteil. Je suis donc monté en train de Lyon pour quelques jours. A ce stade, nous avions établi un planning précis et très chargé pour réaliser toutes les démarches en un temps limité. En effet, j'étais toujours en période de cours.

L'administration française

La première étape a été de trouver un journal d'annonces légales afin de publier la création de la société, ce qui est légalement obligatoire malgré le coût d'une annonce légale (au moins 150 €). Bien sûr, il s'est avéré que le journal auquel nous pensions avait déménagé ce qui n'a pas simplifié la tâche.Il a fallu ouvrir un compte bancaire au nom de la société. Pour cela, la banque nous demande le numéro d'identification de la société (code SIREN). Nous ne l'avons fait pas encore car il faut créer la société pour cela. Or, pour créer la société, il faut un compte bancaire. On se marche vraiment sur la tête. Malgré tout, nous arrivons à comprendre la démarche : il faut ouvrir un compte bloqué avec l'argent du capital, soit 2 000 € dans notre cas (1 000 € chacun), puis nous pourrons le débloquer lorsque la société sera créée.Puis nous avons pu enfin nous rendre à la CCI de Créteil pour établir officiellement la société. Arrivés là-bas, on nous apprend quasiment par hasard qu'il nous faut déposer le dossier de l'ACCRE absolument avant l'établissement de la société. Pas de problème, nous passons à la poste photocopier les documents nécessaires et allons directement au bureau ACCRE. Bien sûr, celui-ci a fermé ses portes juste sous nos nez : "Revenez demain"...Finalement, le lendemain, après à nouveau 1h30 de transports en commun, nous avons pu finaliser l'intégralité des formalités administratives, après s'être délestés d'une centaine d'euros, bien sûr.

Simple IT enfin officiellement déclarée !

Le 17 janvier 2007, la SARL Simple IT est officiellement créée, avec un capital social de 2 000 € réparti équitablement entre les 2 actionnaires que nous sommes. Il restera enfin à finaliser la paperasse concernant la banque, l'ACCRE, les impôts, l'expert-comptable, les documents légaux, ... durant les mois de janvier et février !Finalement, la création de la société nous aura coûté quelques milliers d'euros en taxes, frais, déplacements, dépôts de marque et autres surprises administratives. Il aura fallu quelques mois pour que nous puissions nous rembourser de cette avance faite personnellement à la société.

Mathieu Nebra

Mathieu est co-fondateur d’OpenClassrooms et Education Evangelist.

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Une question de flexibilité