En début d’année, j’avais été invité par Dominique Burger, le président de l’association BrailleNet, au forum européen de l’accessibilité numérique. J’y avais donné une conférence et j’avais produit un petit essai écrit sur le sujet de la gestion d’une communauté d’auteurs/enseignants et apprenants. C’est un peu ce que nous faisons au quotidien sur le Site du Zéro après tout. ;o)
On m’a récemment invité à rédiger un white paper en anglais plus détaillé sur le sujet, qui paraîtra dans un document semblable à celui réalisé l’année dernière. Pour ceux qui ne connaissent pas ce type d’articles, il s’agit essentiellement du point de vue d’experts, chercheurs comme industriels, sur des sujets précis (ici liés à l’accessibilité et l’e-éducation).
Le white paper que j’ai écrit ne paraîtra (en anglais) que dans plusieurs mois. En attendant, on m’a aimablement autorisé à en publier une version résumée en français ici sur ce blog, que je vous propose donc dans la suite de ce billet. :o)
Soyons clairs : je ne prétends pas tout connaître du sujet. Mon but ici est de partager mon expérience et mon point de vue, en espérant que cela puisse servir à d’autres personnes, voire même que cela crée les conditions d’un débat.
Aider une communauté à s’entre-aider
Créer du bon contenu accessible est une chose. C’est d’ailleurs suffisamment dur en soi, mais la vraie difficulté survient lorsqu’on doit faire en sorte que cela puisse fonctionner au sein d’une communauté.
En fait, rien n’arrive jamais vraiment tout seul. Certes, une communauté peut se lancer dans des actions inattendues, comme des rendez-vous spontanés IRL (sur le Site du Zéro, nous avons l’exemple des JSDZ), mais la plupart du temps la communauté est à la recherche de ses leaders qui peuvent lui montrer le chemin. Elle aime avoir un modèle qu’elle peut suivre et sur lequel elle peut itérer, un petit pas à la fois. Identifier les leaders au sein d’une communauté est donc primordial, tout comme le fait de conserver cette communauté en vie en allant dans la bonne direction. Il ne faut pas s’y tromper, il s’agit d’un réel challenge qu’il ne faut pas sous-estimer sous peine de la voir partir très rapidement.
En ce qui concerne le e-learning, il existe plusieurs façons de travailler avec votre communauté pour vous assurer que le contenu est accessible à tous. Le premier, ironiquement, est de laisser vos apprenants seuls au début. Ils ont besoin de temps, sans pression, pour lire, regarder et s’entraîner avant de se sentir suffisamment en confiance pour interagir avec leurs pairs (même s’ils sont juste des débutants comme eux). Cela est dû au fait qu’il existe toujours un important manque de confiance chez pratiquement tous les apprenants : ils pensent qu’on va se moquer d’eux lorsqu’ils commencent (ce qui arrive d’ailleurs parfois et ne contribue pas à résoudre le problème).
Ensuite, lorsque vos apprenants sont prêts, ils peuvent commencer à interagir entre eux. Par exemple, vous pouvez les laisser comparer leurs résultats aux tests et leur donner des outils pour chatter, mais vous pouvez aussi les inviter à poser leurs questions directement depuis le contenu qu’ils sont en train de lire. Pour encourager cela, ils doivent être récompensés pour avoir cherché de l’aide, de même que les experts doivent l’être eux aussi pour avoir aidé.
Montrez à vos experts que vous les aimez
Les experts sont l’un de vos meilleurs actifs. Vous n’avez pas besoin d’en avoir des milliers. Parfois, un seul expert actif sur un domaine spécifique peut faire plus de travail que des centaines d’experts dormants. Pour en avoir et pour les conserver, vous devez les récompenser. Ce qu’ils aiment le plus ? La reconnaissance de leurs lecteurs (ils sont plus rarement à la recherche d’argent qu’on ne le croit).
Donnez à vos lecteurs les outils pour montrer leur amour aux experts. Nous avons par exemple ajouté un simple bouton « J’aime beaucoup ce que vous faites » (avec des petits coeurs dedans), et les auteurs nous ont fait savoir que cela avait eu un impact très positif sur leur moral et leur envie de continuer à rédiger du contenu pour leurs lecteurs.
Par ailleurs, le travail en groupe d’auteurs doit être possible mais pas obligatoire même au sein d’une communauté. Beaucoup d’auteurs aiment démarrer seuls et demander de l’aide seulement lorsqu’ils en ont besoin. Nous avons eu ce bel exemple de Vincent, auteur d’un cours sur Python qui est devenu rapidement très populaire. Lorsque nous lui avons demandé pourquoi il n’y avait aucune illustration au sein de son cours, il nous a expliqué que c’était… parce qu’il était non-voyant (ce qui a été une vraie surprise pour nous). C’est ainsi qu’il a été mis en contact avec un autre membre de la communauté qui l’a aidé à réaliser les illustrations dont il avait besoin. C’est pour nous un bon exemple d’une collaboration intelligente au sein d’une communauté d’auteurs.
En résumé
- Une communauté a besoin de ses leaders qui peuvent lui montrer le chemin en créant du contenu qui peut être ensuite utilisé comme modèle ;
- Vous n’avez pas besoin de beaucoup d’experts pour faire fonctionner votre communauté, mais chacun d’entre eux est très précieux ;
- Vos experts doivent être remerciés en priorité avec des éléments qui montrent la reconnaissance que le reste de la communauté leur porte.
(A suivre…)
Mon white paper original est plus long que cela. Il y a une seconde partie plus orientée sur les challenges à venir du e-learning que je pense publier dans un prochain billet ici même dès que j’aurai trouvé le temps de la traduire. :o)
Merci pour cet article!
J’essaye de créer une « dynamique informatique » dans ma ville avec une communauté au vrai sens du mot. Les points soulevés dans cet article sont donc très intéressants